1 Biographie
Né dans un milieu populaire, Tadao Ando se forme à la charpenterie, entame à dix-sept ans une brève carrière de boxeur professionnel avant de se plonger en autodidacte dans l'architecture. De 1963 à 1968, le jeune homme dévore de nombreux livres ; notamment ceux de Le Corbusier dont il admire les théories et partage le goût pour le béton ainsi que les objets à « réaction poétique » (os rongés, pierres, branchages…). Ses nouvelles connaissances sur les possibilités architecturales lui donnent continuellement envie d’en savoir plus et, à ces fins, il n’hésite pas à entreprendre un long périple à travers le monde. Il découvre l’Amérique du Nord, Moscou, Berlin, Paris et Marseille en 1965, puis Rome, Athènes, l’Afrique, l’Inde… Au retour de son voyage initiatique, en 1969, Tadao Ando fonde son agence à Osaka et se lance dans la construction de modestes logements aux formes minimales. La reconnaissance arrive, six ans après, avec l’une d'elles, la Row House : une maison de petite taille (bâtie sur un terrain de cinquante-huit mètres carrés) opérant une subtile synthèse entre la spiritualité japonaise (ex. l’espace est baigné de lumière grâce à de larges ouvertures vitrées) et la modernité des techniques de construction (elle utilise le béton brut de décoffrage tout autant à l’extérieur qu’à l’intérieur). Ses projets sont généralement discrets - la plupart de ses maisons ne sont pas visibles de la rue - et empruntent des éléments à l’environnement. Pour le complexe Awaji Yumebutai d’Awajishima, bâti sur un coteau s’élançant jusqu’à la mer, Tadao Ando imagine un sol incrusté de coquilles Saint-Jacques… A partir des années 1990, le bois prend progressivement une place de choix dans son œuvre. Il est, par exemple, utilisé pour bâtir le Pavillon japonais de l’Exposition universelle de Séville (1992), le Musée du Bois d’Hyogo… En France, Tadao Ando a notamment dessiné, dans l’enceinte de l’UNESCO, un bâtiment cylindrique de trente-trois mètres carrés destiné à la méditation. Son projet destiné à abriter la fondation Pinault sur l’Ile Seguin n’a, quant à lui, malheureusement pas vu le jour. Bien que dépourvu de tout diplôme, l’architecte japonais est nommé enseignant dans les plus prestigieuses universités - Yale (1987), Columbia (1988) et Harvard (1990) - puis professeur titulaire à l'Université de Tokyo (1991). Il a déjà reçu de nombreuses récompenses internationales dont le Pritzker Architecture Prize (1995)
2 Réalisation
Maison Koshino
Tokyo, Japon
Construction 1979-1981| L'extension 1983-1984
La maison Koshino a représenté un nouveau départ pour Ando. C'est ici qu'il a commencé à démonter le prototype mis au point un peu plus tôt pour la Row House de Sumiyoshi et à en rassembler les morceaux. Il a peu à peu ouvert la boîte fermée pour faire en sorte que l'intérieur et l'extériaur communiquent par ouvertures dans les murs, entre les mur et dans le toit et pour pouvoir organiser ses espaces soigneusement travaillés. Ses thèmes d'expression deviennent alors la texture même des murs et la dramatisation par la lumière. Il commence à utiliser la topographie de manière encore plus souple pour oeganiser son espace.Il appelle sitecraft ce travail de conception autour du site, un processus dans lequel il associe site et construction, intègre le paysage et le onstruit en utilisant totalement le terrain. L'espace intérieur s'étend vers l'espace extérieur et le site tout entier est transformé en un espace assemblé avec une précision artisanale.Cette maison est composée de daux batîments en forme de boîtes de volumes différents, disposées en parallèle de part et d'autre d'une terrase. Le batîment principal contient un séjour double hauteur, une cuisine, une salle à manger et, à l'étage, une chambre principale. L'autre, la partie privée, compote six pièces alignées - chambre avec lit et chambre avec tatami - et une salle de bains. Les deux batîments sont connectés par un corridor souterrain. La terrasse qui les sépare est un séjour extérieur òu l'on bénéficie de la verdure environnante. Ando suggère ainsi une vie au cours de laquelle l'occupant est en permanence conscient de la richesse de la nature dans ce vaste terrain entouré d'arbres. Cette maison, qui peut servir à recevoir des invités le week-end, correspond à un style de vie très différent de celui de la ville
New York, Etats-Unis
1996
Symbolique de la présence grandissante de Tadao Ando aux Etats Unis, ce projet est une addition à un gratte ciel new yorkais des années 1920. L'architecte explique qu'à travers cette penthouse, il souhaite capturer vivante la ville de New York, sans être submergé par son énergie puissance et désordonnée. Boîte de béton gainée d'une membrane de verre, la penthouse semble flotter au sommet de la construction, tandis qu'une autre boîte de forme et de matériaux identiques est incrustés en biais dans l'immeuble, 5 niveaux plus bas. Cet appartement reste le rêve non réalisé d'une personne qui possède un immeuble au centre de Manhattan et veut y créer un jardin d'eau au somet et 712m² supplémentaire. Il a souvent montré sa prédilection pour la juxtaposition d'éléments anciens et nouveaux, et la revitalisation de constructions anciennes dans ses projets comme, par exemple, la bibliothèque internationale de la littérature enfantine à Tokyo, dans laquelle, une barre de verre a été insérée à travers le rez de chaussée d'un bâtiment existant. Des volumes de béton gainés de verre sont également présents dans certaines constructions comme le musée de la Préfecture de Hyogo à Kobé ou le nouveau musée art moderne de Fort Worth. Bien que le projet date de 1996, l'architecte le considère toujours comme un projet en cours qui sera mis en chantier dès que les conditions le permettront
3 Photos
4 Citations
"Des choses comme la lumière et le vent n’ont une importance que s elles sont introduites dans une maison sous la forme d’extraits du monde extérieur"
"Peut-être sera-t-il possible de réaliser ce rêve ultime : réunir l'humanité entière en une seule communauté. Cependant, avant cela, la science n'aura-t-elle pas définitivement échappé au contrôle de l'homme?"
"Nous devons créer des espaces architecturaux dans lesquels il est possible de susciter — autant qu’il l'est à travers la poésie et la musique — la surprise, la découverte, la stimulation intellectuelle, la paix et la joie de vivre"
“La lumière est l’origine de tout être”
5 Architecture du Béton et de la Lumière
Tadao Ando a grandi dans une maison qui faisait face à une menuiserie et il a passé une grande partie de son temps libre dans cet atelier.
Plus tard, après cette connaissance de la relation entre la forme et le matériau, sa sensibilité architecturale lui fera comprendre la relation entre matériau-forme et volume-vie humaine. Ando n’utilise pas directement cette connaissance du bois dans son design. Cependant il s’en sert pour juger la qualité du coffrage dont le béton reprend les qualités de surface. Le matériau de prédilection de Tadao Ando est donc le béton Mais cela ne s’inscrit pas dans l’idée de discontinuité historique comme il l’a été en Occident. Le béton est respecté pour ces caractéristiques esthétiques et est considéré comme un matériau noble au même titre que le bois.
Pour Ando, l’intérêt de cet artisanat du béton est qu’il permet une grande qualité de la surface sur laquelle il peut jouer avec la lumière Le béton “ est le matériau le plus approprié pour réaliser des surfaces crées par des rayons lumineux…Les murs deviennent abstraits, sont déniés, et approchent la limite ultime de l’espace. Leur réalité est perdue, et seulement l’espace qu’il enferme donne un sens de vraie existence". Une raison pour laquelle Tadao Ando affectionne particulièrement le béton peut aussi se trouver dans ses impressions de voyages en Europe. En effet, les murs épais de béton à la surface rugueuse ne sont pas sans rappeler les murs de maçonnerie dans constructions moyenâgeuse de nos pays.
Ando est d’ailleurs le premier architecte à oser construire une pièce de cérémonie du thé en béton. Pour lui ce matériau répond parfaitement a la philosophie recherchée dans la cérémonie du thé. Ando utilise le béton comme un matériau froid et inorganique mais avec une capacité de tension. Il ne cherche pas à exprimer la nature propre du matériau mais à l’employer pour la qualité de l’espace.
Si les premiers travaux de Tadao Ando ont pour thème l’opposition entre mur et poteau, il trouvera l’expression complète de son talent dans l’opposition entre transparence et opacité qu’il commencera avec la maison Ichihara, ou Glass block house, en 1978. La lumière crée tout, elle est la forme fondamentale du sens de l’espace. Elle permet à l’homme de percevoir l’espace qui l’entoure et ainsi définir son propre être. La lumière naturelle définit aussi le temps car elle change avec le moment du jour et de l’année. L’église de la lumière n’était au commencement qu’une boite de béton. Puis Tadao Ando coupe deux lignes dans un des murs.“A ce moment, un rayon de lumière fracture l’obscurité. Mur, sol et plafond, chacun intercepte la lumière, et leur existence est révélée”
La culture japonaise est la culture de la “demi-lumière” célébrée et analysée par le célèbre auteur Jun’ichioro Tanizaki : Pour transcrire cela en volume, Tadao Ando utilise des fenêtres basses pour créer une lumière diffuse ou des ouvertures zénithales qui produisent une infinité de lumières douces (légères) en tangentant les murs. Sur ces lumières douces, les poutres dessinent leurs ombres en lignes sombres et forment ainsi les “ombres lourdes”.
Tadao Ando utilise aussi un autre moyen pour le même effet. Il dessine un plan à trame rectangulaire et insère dedans des murs circulaires. Les murs droits, les poutres et les poteaux créent des ombres brutes sur les ombres légères et dégradées des formes courbes.
Pour créer des “variations de lumières et d’humeurs”, Ando réutilise un élément de l’architecture traditionnelle: l’eau. L’eau est la part spirituel et la plus importante dans la conception du jardin japonais. C est l’endroit où architecture et nature s’entremêlent. “ Dans le passé, la résidence ne faisait qu’un avec la nature”. L’eau est profitable à la méditation, elle symbolise la continuité du temps mais aussi la vie. L’eau peut diffracter la lumière pour créer des couleurs qui entrent dans le bâtiment. Les couleurs changent avec les moments de la journée et les saisons et changent l’humeur des habitants.
Si le temps est clair, l’eau peut devenir une surface miroitante et créer une extension de la structure de la construction. Si le temps se dégrade, l’eau crée des vibrations de lumière autour et à l’intérieur du bâtiment Ainsi, une philosophie millénaire entre dans un bâtiment de forme moderne.